Une pression au travail du plus en plus forte...

La pression au travail est de plus en plus décriée par les salariés qui, épuisés risquent de faire un burn out.Les conditions de travail semblaient bien plus difficiles il y a quelques dizaines d'années (notamment durant les années 1950 à 1970). Néanmoins, les salariés n'évoquaient que très rarement la notion de pression au travail.
Mais aujourd'hui, alors que les conditions de travail ne sont plus aussi difficiles, les salariés ressentent une pression de plus en plus grande. Aussi, l'augmentation considérable de cas de burn out et de suicide au travail en est une bonne illustration.


Comment expliquer la montée de la pression subie par les salariés?

Tout a commencé dans les années 1970, où s'est amorcé une tendance à individualiser les situations de travail, avec notamment l'apparition des primes de salaire individualisées. Les salariées sont donc progressivement entrés en concurrence, et le travail est devenu au fil du temps une épreuve solitaire où chacun est évalué personnellement.
En fait, en évaluant l'intégralité de l'individu, le management pense qu'il obtiendra l'engagement total de celui-ci. Mais cela a de lourdes conséquences sur les salariés. En voici les principales:

  • La pression est internalisée: dans le passé, des collectifs de travailleurs régulaient la dureté des conditions de travail par la solidarité, l'entraide et par un décryptage politique et idéologique des conditions de travail. Ainsi, si l'on souffrait au travail, ce n'était pas parce qu'on n'était pas à la hauteur en tant que personne, mais parce qu'une organisation sociale surexploitait les forces de travail.
    Aujourd'hui, en évaluant le salarié dans son intégralité (ses qualités, son potentiel, son humanité, sa créativité, ses aspirations, etc...) et non uniquement sur ses compétences, la pression devient énorme. En effet, s'il commet une erreur, ce n'est plus une faute professionnelle, mais une insuffisance personnelle. En d'autres termes, si le salarié échoue, c'est toute sa personne qui est remise en question.

  • La distance entre vie professionnelle et vie privée s'amenuise: avant, quand un salarié allait mal, il savait qu'il n'était pas le seul. Mais aujourd'hui, étant donné que les problèmes professionnels sont aussi des problèmes personnels, les salariés ont tendance à ramener leurs échecs dans leur sphère privée. Les problèmes professionnels envahissent alors toute la vie de l'individu. D'ailleurs, ce sont souvent les salariés les plus investis dans leur emploi qui se suicident.

Il s'avère donc essentiel pour les salariés de retrouver une dimension collective dans leur travail, par exemple en instaurant des entretiens collectifs. En effet, c'est en recréant des liens avec les autres salariés qu'ils pourront découvrir qu'ils ne sont pas les seuls dans cette situation. En outre, la restauration de la frontière entre le professionnel et la personne éviterait l'intrusion insupportable du travail dans la vie privée des salariés.


N'y a-t-il pas également un sentiment d'accélération temporelle?

La mondialisation a entraîné une succession de transformations. Celles-ci se sont répercutées sur le fonctionnement des entreprises, qui ont dû s'adapter à ces évolutions. Mais au-delà de cette adaptation nécessaire est apparu un changement perpétuel des conditions de travail: restructuration, recomposition, mobilité, déménagement, externalisation, réorganisation... sont désormais des termes employés couramment dans le monde du travail. Aussi, les effets de ces changements perpétuels sur les salariés sont considérables:

  • Le recours au benchmarking: les grandes entreprises ont recours à des cabinets dont les experts définissent des protocoles sensés optimiser l'organisation du travail. Plus précisément, le principe du benchmarking est d'implanter ailleurs des pratiques déjà existantes dans un domaine. Cela peut consister, par exemple, à appliquer dans un hôpital les méthodes utilisées dans un aéroport pour réceptionner les passagers. Le problème est que ces cabinets sont souvent loin de la réalité des métiers qu'ils encadrent. En outre, ils ont tout intérêt à professer continuellement des renouvellements révolutionnaires pour entretenir leur marché.

  • Une perte d'initiative imposée aux salariés: le changement permanent permet de rendre obsolète le savoir et l'expérience des salariés. Ces derniers doivent donc sans cesse repartir de zéro et se retrouvent en situation d'apprentissage permanent. Ainsi, les salariés, désormais sans repère, n'ont donc d'autres choix que de se raccrocher aux méthodologies préconisées. Cela entraîne chez eux un épuisement et une pression considérable, avec un risque accru de burn out.

En somme, le changement permanent effrite progressivement la personnalité de l'individu et rend obsolète ses connaissances et ses savoirs. De fait, l'individu n'existe plus que comme être humain au travail. D'ailleurs, les directions des ressources humaines, conscientes du mal-être grandissant des salariés, leurs proposent de plus en plus une aide (méditation, massage, etc...) au travail mais aussi en dehors, réduisant ainsi encore un peu plus la distance entre la sphère professionnelle et la sphère privée... C'est ainsi que sont apparues dans certaines entreprises des DRH du bonheur et de la bienveillance.


Inspiré des travaux de Danièle Linhart, de Vincent de Gaulejac, et de Christophe Dejours.

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