La définition de Acting-out


L'acting out et l'Agieren

L'acting-out doit être clairement distingué du passage à l'acte. Pour Sigmund Freud, l'Agieren tentait de recouvrir les actes d'un individu aussi bien hors de l'analyse que dans l'analyse. Aussi, ce terme d'Agieren laisse naturellement planer une ambiguïté puisqu'il recouvre deux significations:

  • Celle de bouger, d'agir, de faire une action.
  • Celle de réactualiser dans le transfert une action antérieure.


Selon la seconde définition, pour Freud, l'Agieren viendrait à la place d'un se remémorer: agir donc, plutôt que de se souvenir, de mettre en mots. L'anglais to act out conserve cette ambiguïté. En effet, il signifie aussi bien jouer une pièce, un rôle, donner à voir, montrer, etc... que agir, prendre des mesures.


L'acting-out en psychanalyse

Les psychanalystes français ont adopté le terme d'acting-out en lui adjoignant pour traduction et synonyme celui de passage à l'acte, mais en ne retenant de l'acte que la dimension de l'interprétation à donner dans le transfert. Jusque-là, l'acting-out était habituellement défini comme un acte inconscient, exécuté par un sujet hors de lui-même, effectué à la place d'un se souvenir de. Cet acte, toujours impulsif, pouvait aller jusqu'au meurtre ou au suicide. Pourtant, aussi bien la justice que la psychiatrie classique s'étaient vues régulièrement confrontées à ces questions d'actes hors de toute relation transférentielle, pour déterminer une éventuelle responsabilité civile.


Une conduite qui demande à être déchiffrée

C'est à partir de là que la psychanalyse s'est posé la question : qu'est-ce qu'un acte pour un sujet? Jacques Lacan, dans son Séminaire X (1962-1963), L'angoisse, a proposé une conceptualisation différenciée entre l'acte, le passage à l'acte et l'acting-out. Pour Lacan, un acte est toujours signifiant. L'acte inaugure toujours une coupure structurante qui permet à un individu de se retrouver, dans l'après-coup, radicalement transformé, différent de ce qu'il était avant cet acte.
L'acting-out est une conduite tenue par un individu et qui demande à être par la personne à qui elle s'adresse. C'est un transfert, bien que le sujet ne montre rien. Quelque chose se montre, hors de toute remémoration possible et hors de toute levée d'un refoulement. L'acting-out donne à entendre à un autre devenu sourd. C'est une demande de symbolisation exigée dans un transfert sauvage. L'acting-out, dans une recherche de la vérité, mime ce qu'il ne peut dire, par défaut de symbolisation. Celui qui agit dans l'acting-out ne parle pas en son nom. Il ne sait pas qu'il est en train de montrer, pas plus qu'il ne peut reconnaître le sens de ce qu'il dévoile. C'est à l'autre qu'est confié le soin de déchiffrer, d'interpréter les scénarios. C'est l'autre qui se doit de savoir que se taire est métonymiquement un équivalent de mourir.


Comment déchiffrer l'acting-out

Mais comment cet autre pourrait-il déchiffrer l'acting-out, lui qui ne sait pas lui-même qu'il ne soutient plus la place où l'individu l'avait installé? Car l'acting-out est précisément un coup de folie destiné à éviter une angoisse trop violente. Il est mise en scène aussi bien du rejet de ce que pourrait être le dire angoissant de l'autre, que du dévoilement de ce que l'autre n'entend pas. Il est le signe fait à quelqu'un, de ce qu'un faux réel vienne à la place d'un impossible à dire.
Durant une analyse, l'acting-out est toujours le signe que la conduite de la cure est dans une impasse. Il révèle la défaillance de l'analyste, mais pas forcément son incompétence. Il s'impose lorsque, par exemple, l'analyste, au lieu de soutenir sa place, se comporte en maître ou fait une interprétation inadéquate, voire trop juste ou trop hâtive. Pas plus qu'un autre, l'analyste ne peut interpréter l'acting-out, mais il peut, par une modification de sa position transférentielle, et donc de son écoute, permettre à son patient de se repérer autrement et de dépasser cette conduite, pour s'insérer à nouveau dans un discours. Car être seulement un faux réel implique pour l'acting-out que l'individu puisse en revenir. C'est un billet aller-retour, sauf s'il entraîne dans sa suite un passage à l'acte qui, lui, est le plus souvent un aller simple.


Le passage à l'acte

Selon Lacan, se laisser tomber, c'est le corrélat essentiel de tout passage à l'acte. En outre, il souligne que, à partir du passage à l'acte, lorsqu'une personne est confrontée radicalement à ce qu'elle est comme objet pour l'Autre, elle y réagit sur un mode impulsif, par une angoisse incontrôlée et incontrôlable, en s'identifiant à cet objet qu'elle est pour l'Autre et en se laissant choir.
Dans le passage à l'acte, c'est toujours du côté du sujet que se repère ce se laisser tomber, cette évasion hors de la scène de son fantasme, et sans qu'il puisse s'en rendre compte. Il se produit pour un individu lorsque celui-ci est confronté au dévoilement intempestif de l'objet a qu'il est pour l'Autre, et c'est toujours au moment d'un grand embarras et d'une émotion extrême lorsque, pour lui, toute symbolisation est devenue impossible. Il s'éjecte en s'offrant à l'Autre, comme si cet Autre devenait pour lui imaginairement incarné et pouvait jouir de sa mort.
Le passage à l'acte est donc un agir impulsif inconscient et non pas un acte. Contrairement à l'acting-out, il ne s'adresse à personne et n'attend aucune interprétation, même s'il survient lors d'une cure analytique. Le passage à l'acte traduit une demande d'amour, de reconnaissance symbolique sur fond de désespoir, demande faite par une personne qui ne peut se vivre que comme un déchet à évacuer. Le passage à l'acte se situe du côté de l'irrécupérable, de l'irréversible. Il représente toujours le franchissement de la scène, au-devant du réel, l'action impulsive dont la plus typique consiste en la défenestration. Il est un jeu aveugle et une négation de soi. Il constitue la seule possibilité, ponctuelle, pour un sujet de s'inscrire symboliquement dans le réel déshumanisant. Il est souvent le refus d'un choix conscient et accepté entre la castration et la mort. Il est la révolte passionnée contre l'incontournable division de l'individu. Il est la victoire de la pulsion de mort, le triomphe de la haine et du sadisme. Le passage à l'acte est aussi le prix toujours payé trop cher pour soutenir inconsciemment une position de maîtrise, dans l'aliénation la plus radicale, puisque la personne est prête à la payer de sa vie.

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