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Deux séances de médiumnité chez Mme Bisson - Partie 1

Annales des sciences psychiques

En 1914, par Boirac E.

J'ai pu, dans le cours du mois de Janvier dernier, le 20 et le 22, être témoin des étranges phénomènes, objets de vives controverses, que Mme Bisson a décrits dans son récent livre sous le nom de Phénomènes dits de Matérialisation, et qu'elle a patiemment étudiés, pendant plus de a ans, avec le concours du Dr de Schrenck-Notzing et d'un certain nombre d'autres savants. Contrairement à la belle assurance de certaines critiques qui n'hésitent pas à trancher le débat sans avoir assisté à aucune de ces expériences, j'estime que deux séances ne suffisent pas pour porter en parfaite connaissance de cause un jugement définitif sur des faits aussi obscurs et aussi troublants; mais j'en ai vu assez pour être profondément reconnaissant à Mme Bisson d'avoir bien voulu me fournir les moyens d'observer quelques-uns des phénomènes signalés par elle et surtout, de me rendre compte par moi-même des conditions dans lesquelles ils se produisent.

A la première séance, assistaient avec moi le professeur CI., de l'Université de Genève, M. Guillaume de Fontenay, le Dr Bourbon et deux jeunes Internes des hôpitaux de Paris, à qui Mme Bisson avait bien voulu permettre de m'accompagner chez elle.

Nous commençâmes par examiner minutieusement les vêlements que devait revêtir le médium, un peignoir bleu dans lequel elle arrive, un maillot-combinaison en tricot noir, un sarrau également noir, pareil à celui que portent les jeunes écolières; puis-nous fîmes, M. CI. et moi, l'inspection du cabinet médiumnique, placé dans un angle du salon. Ni dans les trois parois en étoffe, tendue sur un léger bâti de bois, appliquées sur les murs et reposant directement sur le sol, ni dans les deux rideaux qui en garnissent l'entrée, libres et mobiles aussi bien sur leurs bords latéraux que sur leur fente médiane, ni dans le plafond consistant en une simple toile, ni dans le tapis d'une seule pièce, ni dans le fauteuil, tout entier en lattes de bois — notre vue ni notre toucher ne parvinrent à découvrir rien de suspect. Un appareil à photographie stéréoscopique, apporté par M. de Fontenay, fut démonté devant nous et examiné dans toutes ses parties avant d'être installé dans un coin du cabinet, à mi-hauteur, sur la traverse médiane du bâti, à droite du fauteuil, mais hors de la portée de la main d'une personne qui y serait assise.

Une fois cette inspection achevée, Mme Bisson emporta le peignoir en flanelle bleue et alla chercher le médium dans l'autre appartement situé sur le palier du même étage. Nous vîmes entrer une jeune fille couverte de ce seul peignoir, qui en notre présence revêtit le maillot-combinaison d'une seule pièce, formant tout à la fois bas, caleçon et corsage et s'appliquant exactement sur le corps, sauf à l'ouverture du dos. Celle-ci fut cousue sous nos yeux par Mme Bisson, avec du fil blanc; puis le médium revêtit le sarrau, dont les manches furent également cousues autour des poignets. On défit alors la chevelure qui fut soigneusement explorée avant d'être sommairement tordue et fixée par deux épingles; on examina la bouche, la langue, l'arrière gorge, les gencives; on fit de même pour les yeux, les paupières et les oreilles; et c'est seulement alors que le médium fut conduit par nous dans le salon et introduit dans le cabinet où il s'assit sur le fauteuil entre les rideaux écartés, tenant sur ses genoux ses mains parfaitement visibles en dehors des rideaux.

Pendant toute la durée de la séance, la pièce fut éclairée par la lumière blanche d'une lampe électrique de 50 bougies, tamisée par un léger voile de gaze violette flottant autour de l'ampoule. Cette lampe, pendant au plafond, était placée derrière un paravent s'élevant à peu près à hauteur d'homme, en face du cabinet. La lumière était suffisante pour qu'on pût voir l'heure à sa montre, lire un texte écrit en caractères un peu gros, discerner parfaitement les visages et apercevoir les mouvements de tous les assistants. Il serait utile qu'on pût apporter encore plus de précisions à cet égard en indiquant exactement, à l'aide d'un photomètre, le degré d'intensité de la lumière par la lampe au cours des séances médiumniques.

Mme Bisson s'assit devant le médium, lui prit les pouces et le regarda fixement. Le sommeil se produisit avec une grande rapidité. Les rideaux furent alors rapprochés de façon à maintenir le corps du médium dans l'ombre, mais ses mains, accrochées aux rideaux à gauche et à droite, restèrent nettement visibles, extérieures au cabinet, et pendant toute la durée de la séance, nous ne les perdîmes pas de vue un seul instant; chacun de nous put, non seulement les voir, mais les toucher. A de certains moments, ces mains quittaient les rideaux et se tendaient vers nous, tandis que le médium demandait qu'on lui donnât des forces; je les ai, pour ma part, tenues pendant de longues minutes. Ce n'étaient pas des mains en caoutchouc ou en baudruche: c'était bien les mains du médium, chaudes, moites, vivantes. Il faut absolument écarter l'idée que le médium, dans les conditions de contrôle où nous l'avons observé, puisse faire intervenir ses mains dans la production des phénomènes.


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