L'illusion de supériorité ou la surestimation de nos compétences

Qui n'a jamais discuté avec une personne qui prétend avoir de vastes connaissances sur un sujet auquel elle s'intéresse depuis peu, mais sur lequel elle a déjà passé des heures à rechercher des informations ?
D'ailleurs, le domaine le plus propice à ce sentiment d'expertise est la santé. C'est le cas, par exemple, de la question du vaccin qui tend à susciter un grand intérêt chez de nombreux parents alors tentés de glaner un maximum d'informations sur internet pour mieux déterminer les bienfaits ou les risques encourus. Et après avoir passé beaucoup de temps à apprendre, ils se sentent suffisamment experts (parfois même plus que les médecins) pour prendre la décision de vacciner ou non leur enfant.

Pourtant, bien que les connaissances acquises après avoir consulté une partie des nombreuses informations disponibles semblent largement suffisantes, elles s'avèrent en fait complètement superficielles. Cette erreur de jugement de nos propres compétences a d'ailleurs un nom : l'illusion de supériorité.


Comment se caractérise l'illusion de supériorité ?

L'illusion de supériorité apparaît dans la première étape de recherche d'informations sur un thème nouveau. Aussi, les psychologues David Dunning et Justin Kruger ont décrit ce phénomène avec précision :

L'effet Drunning-Kruger se caractérise par un sentiment d'en savoir davantage que la moyenne et même que les experts sur un sujet donné auquel on s'intéresse depuis peu.Lorsque nous commençons à rechercher des informations sur un sujet donné, nous sommes généralement conscients de notre propre ignorance. Puis, après avoir consulté une petite partie des informations disponibles sur ce sujet, la conviction d'en savoir suffisamment commence à émerger. Et c'est précisément à cette étape que l'illusion de supériorité apparaît. D'ailleurs, les chercheurs ont baptisé cette phase le "pic du mont Stupide".

Ensuite, si nous poursuivons nos recherches, nous commençons à entrevoir la complexité de certains arguments. Nous prenons alors conscience de nos lacunes avec la désagréable impression de ne jamais pouvoir maîtriser le sujet. C'est ce que les spécialistes appellent la "vallée du désespoir". Mais si nous persévérons dans nos recherches en gravissant la "pente de l'Illumination", nous finissons par atteindre un état où, tout en continuant d'acquérir de nouvelles connaissances, nous devenons relativement experts. Il s'agit du "plateau de la Durabilité".

Ainsi, il est très important de garder à l'esprit le piège du "pic du mont Stupide" lorsque nous nous intéressons à un sujet nouveau, pour mieux l'éviter.


Y a-t-il des facteurs susceptibles d'influencer la perception que nous avons de nos aptitudes ?

Il existe effectivement divers facteurs qui favorisent une surestimation de nos compétences. En voici les principaux :

  • L'intelligence : il existe une relation inversement proportionnelle entre le QI (quotient intellectuel) et la capacité à évaluer ses propres aptitudes. Autrement dit, plus notre QI est faible, plus nous avons tendance à surestimer nos compétences. Ainsi, avoir conscience de son ignorance demande une certaine intelligence !

  • L'âge des personnes auxquelles nous nous comparons : l'illusion de supériorité tend à se manifester surtout lorsque nous nous comparons à des individus de notre âge ou plus jeunes.

  • Le domaine concerné : le mécanisme de supériorité illusoire s'observe particulièrement dans le domaine de la santé. Par exemple, si l'on demande à des personnes de modifier leur mode de vie en privilégiant des habitudes potentiellement moins risquées, à peu près toutes se disent aptes à le faire. Pourtant, de telles modifications comportementales sont très rarement opérées. C'est d'ailleurs un réel obstacle à l'efficacité des campagnes de préventions.

Cela dit, même s'il est sans doute préférable d'être conscient de cette illusion de supériorité, la combattre à tout prix n'est peut-être pas indispensable, car sans ce mécanisme cognitif nous manquerions de confiance en nous pour faire certains choix décisifs.


Inspiré des travaux de Daniela Ovadia, de David Dunning, de Justin Kruger, de Vera Hoorens, de Peter Harris et de Shelley Taylor.

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