Quand des fœtus se développent dans des utérus artificiels...

Il y a quelques mois, des scientifiques sont parvenus à faire grandir des fœtus d'agneau dans des utérus artificiels pendant 4 semaines !
Un utérus artificiel de brebis vient d'être mis au point par des chercheurs. Quel serait l'impact de l'utilisation d'un tel dispositif chez les grands prématurés humains?Plus précisément, ces fœtus ont été placés à partir de 15 ou 16 semaines de gestation (l'équivalent de 23 ou 24 semaines de gestation pour un fœtus humain) dans un système constitué d'un film de polyéthylène translucide contenant du liquide dont la composition équivaut à celle du liquide amniotique. Les organes de ces fœtus se sont alors développés normalement.

Cette expérience marque une étape cruciale dans la recherche sur la gestation. Mais les conséquences sont encore indéterminées. En effet, si ce type de croissance ex utero, appliqué à l'humain, pourrait nettement améliorer le taux de survie des grands prématurés, on ignore l'impact que pourrait avoir l'absence d'interaction mère-fœtus, de stimulations sensorielles, etc... sur leur développement.


Ce dispositif ne représente-t-il pas une avancée remarquable?

Grâce à un tel dispositif, les chances de survie des prématurés pourraient être considérablement augmentées, ce qui représente un intérêt indéniable. En effet, un tel environnement physiologique et protecteur apporterait aux fœtus une maturité pulmonaire et une neurogenèse normale. En outre, certains dispositifs tels que des ultrasons, une caméra infrarouge ou des haut-parleurs transmettant le bruit cardiaque et les sons abdominaux de la mère, permettraient aux parents d'entretenir un contact avec le fœtus.

Cependant, le développement embryonnaire est un processus très complexe qui résulte de nombreuses interactions, notamment avec la mère et son environnement.


L'utérus artificiel pourrait-il présenter un risque pour le développement normal de l'enfant?

Malgré les bénéfices certains qu'il offre, ce type d'appareil pose tout de même le problème de la séparation précoce et prolongée entre la mère et son enfant. Or, une telle séparation a des conséquences néfastes sur la libération d'hormones, le déclenchement de la lactation, mais également sur la relation d'attachement et le développement neuro-cognitif du nourrisson.
En effet, le système nerveux central ainsi que les systèmes sensoriels ont besoin de stimulations apportées par le corps maternel pour se développer normalement. Par exemple, dans un incubateur, les mouvements du fœtus ne seraient plus régulés par la variabilité de tension abdominale (selon que sa mère est active ou au repos), ils n'auraient même aucun retour. Or, c'est grâce à ce type d'interactions et de réponses corporelles de la mère aux mouvements du fœtus que se mettent en place les apprentissages moteurs et associatifs. Car au dernier trimestre de gestation, le fœtus est capable de percevoir l'information sensorielle, de la traiter et de la mémoriser.

Pour l'instant, il est difficile d'imaginer les conséquences d'une telle séparation pendant près d'un mois. Néanmoins, les études sur les effets de privations sensorielles chez l'animal ont déjà mis en évidence des anomalies fonctionnelles graves, notamment des retards sensoriels et moteurs.
En somme, si ce dispositif offre l'espoir de sauver de nombreux prématurés, il soulève également la question l'impact délétère d'un environnement utérin artificiel sur le développement de l'enfant.


Inspiré des travaux de Joëlle Provasi, de Benoist Schaal et de Emily Partridge.

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