Le djihadisme ou l'embrigadement funeste des jeunes

De plus en plus de jeunes sont séduits par l'islamisme radicale. En effet, les rabatteurs de Daesh savent parfaitement utiliser les réseaux sociaux pour recruter les jeunes.Ces dernières années, la radicalisation islamiste chez les jeunes, notamment avec le mouvement djihadiste, est montée en puissance. Ce triste succès repose en grande partie sur les réseaux sociaux internet, au point que l'on parle désormais d'embrigadement 2.0.
En effet, il faut bien reconnaître que Daesh sait parfaitement utiliser les outils modernes de communication pour séduire et recruter de jeunes djihadistes.


Quelles sont précisément ces techniques d'enrôlement via internet?

Contrairement au recrutement classique qui consiste à adopter une approche large, les rabatteurs de Daesh proposent, à travers les réseaux sociaux, une offre personnalisée qui répond mieux aux besoins et aux motivations profondes du jeune ciblé. Par exemple, une personne au profil altruiste se verra proposer une mission humanitaire pour sauver les enfants victimes de Bachar el-Assad. Ou encore, un individu au profil révolutionnaire aura l'opportunité de combattre le régime autoritaire syrien.
Cette individualisation facilite l'intériorisation de l'idéologie proposée car elle s'accorde tout à fait aux aspirations du jeune et donne du sens à sa vie. De fait, elle accélère grandement le processus d'embrigadement.

Par ailleurs, bien que les parcours varient d'un individu à l'autre, on peut néanmoins identifier quatre grandes étapes dans le processus d'endoctrinement:

  • 1- L'isolement social et familial: le recruteur persuade le jeune qu'il vit dans une société de mensonge. Dans les théories du complot qu'il expose, des faits réels sont mêlés à des éléments non vérifiables. Aussi, pour mieux illustrer ses propos, il fait souvent référence au film Matrix. Le jeune commence alors à douter de tout et à voir les personnes de son entourage, soit comme des aveugles incapables de discerner la vérité, soit comme des personnes payées pour l'empêcher d'ouvrir les yeux (c'est notamment le cas de ses professeurs, voire de ses parents).

  • 2- La désindividualisation au profit du groupe: le recruteur explique clairement au jeune qu'il fait partie de ceux qui ont du discernement. Ce dernier va désormais être assimilé à son nouveau groupe, au détriment de son identité propre. Il va alors adopter une tenue vestimentaire conforme au groupe. Et il en est de même pour ses pensées. En effet, ses souvenirs vont progressivement se dissoudre pour être remplacés par des slogans islamiques sortis de leur contexte.

  • 3- L'adhésion à l'idéologie radicale: le jeune est persuadé de détenir la vérité et adhère totalement aux croyances de l'idéologie radicale. Dès lors, le concept de pureté et de primauté du groupe prévaut. Désormais, le jeune ne se mélange plus à ceux qui ne pensent pas comme lui.

  • 4- La déshumanisation de soi et des autres: les émotions et la pensée du groupe ont complètement remplacé celles de l'individu. De fait, le jeune est prêt à se sacrifier pour l'idéologie à laquelle il adhère. Aussi, par l'effet de primauté du groupe, ceux qui n'adhèrent pas à cette idéologie ne sont pas considérés comme des êtres humains. Par conséquent, les tuer n'est pas vraiment un crime, ce serait même un devoir. Sans compter que la banalisation des actes de cruauté contribuent à détruire toute notion d'humanité.

Un désembrigadement est-il possible?

Heureusement, un désendoctrinement est généralement possible, mais il est souvent très difficile et très long. De plus, il est important de savoir que tenter de raisonner une personne enrôlée est voué à l'échec.
En fait, le processus de désenrôlement doit toujours commencer par la réactivation d'un lien affectif, grâce aux souvenirs. Car même si les souvenirs ont été enfouis, voire détruits, le cerveau conserve toujours des traces de ressentis passés. Cependant, réactiver de tels souvenirs est souvent très compliqué car la rupture entre le jeune et sa famille est généralement totale.

Une fois que l'ancienne vie resurgit peu à peu dans la mémoire du jeune, celui-ci va recommencer à penser par lui-même et peut-être aussi à douter de l'idéologie à laquelle il consacre son existence. Des témoignages d'anciens djihadistes sont souvent très utiles à ce moment, car ils l'aident à prendre conscience du mécanisme d'embrigadement, mais aussi de l'écart entre ses attentes des débuts et la réalité constatée sur le terrain.
Par la suite, le jeune va se reconstruire petit à petit et développer de nouveaux liens sociaux. Cependant, des rechutes sont fréquentes.


Inspiré des travaux de Dounia Bouzar.

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