La définition de Neuropsychiatrie

La neuropsychiatrie désigne la psychiatrie en tant qu'elle est considérée comme une pathologie du système nerveux central, indissociable de la neurologie.


L'histoire de la neuropsychiatrie en France

Au XIXe siècle, la loi de juin 1838 fixant les modalités d'internement amenait à créer des établissements spécialisés. Les aliénistes pouvaient désormais étudier chez leurs patients des maladies comme les autres disciplines médicales et avec des méthodes équivalentes. Ce courant organiciste s'attache à la nosographie et s'appuie sur la physiologie. Ainsi, pour un anatomo-physiologiste comme Marie François Bichat, les maladies sont dues à des lésions tissulaires. De même, Si François Broussais insiste sur le rôle de l'inflammation, il cherche à étayer ses théories par des études anatomiques. En outre, au-delà de l'anatomie, les progrès des méthodes de laboratoire rendent désormais possibles les études microscopiques. Ainsi, la méthode anatomo-clinique cherche à faire correspondre une lésion tissulaire à une maladie, voire à un signe dit pathognomonique, caractéristique de cette maladie.
La psychiatrie, elle, doit se contenter de décrire les syndromes sans leur trouver de bases organiques lorsque. Mais en 1822, Antoine Bayle découvre qu'une méningite chronique est à l'origine d'une affection commençant par une monomanie avec délire de grandeur qui évolue vers une manie puis une démence et aboutit à la mort. Par la suite, en 1879, Alfred Fournier reconnaît la nature syphilitique de cette maladie, la paralysie générale. Aussi, cette affection, devenue très rare depuis que la syphilis est traitée avec succès grâce aux antibiotiques, servira longtemps de modèle aux organicistes.
Plus tard, à la suite de Franz Gall, l'idée des localisations fonctionnelles cérébrales se développe. Ainsi, le cerveau est composé d'une juxtaposition de centres que l'on peut stimuler ou détruire expérimentalement. Les affections mentales dépendraient non seulement d'un processus physiopathologique, mais de structures cérébrales bien définies. Les anatomistes décrivent alors les lobes et les circonvolutions du cerveau. Aussi, en 1861, Paul Broca montre qu'une fonction peut être atteinte lors d'une lésion spécifique du cerveau. Puis il localise le centre du langage dans la 3e circonvolution frontale gauche et définit la notion d'hémisphère dominant. Ainsi, des aires motrices, sensitives, sensorielles (auditive, visuelle) ainsi que des aires non spécifiques, dites associatives sont décrites, constituant une véritable carte du cerveau.


La théorie organo-dynamique

Pour les grandes entités psychiatriques, des conceptions moins localisatrices ont prévalu au XXe siècle comme la théorie organo-dynamique, élaborée par le neurologue britannique John Jackson et du psychiatre français Henri Ey ou même la théorie plus physiologique de Ivan Pavlov.
Plus précisément, pour Ey, la maladie correspond à une déstructuration de fonctions psychiques hiérarchisées. Un processus organique est supposé être à l'origine de cette dissolution, qui entraîne une régression à un niveau de fonctionnement inférieur. Le lien avec la neurologie est maintenu. En effet, une dissolution partielle conduit à des troubles neurologiques localisés, alors qu'en psychiatrie cette dissolution est globale.


La dégénérescence

Certains organicistes, sous l'influence de Charles Darwin, ont insisté sur le caractère évolutionniste de la personnalité. Ainsi, la maladie mentale traduirait une dégénérescence, une déviation par rapport au type humain normal qui est transmise par l'hérédité et qui s'aggrave peu à peu jusqu'à l'extinction de la famille. Cette dégénérescence résulte de causes variées, qui peuvent être organiques mais aussi morales ou sociales. Sa conséquence la mieux connue serait la démence précoce, que l'on appellera plus tard schizophrénie. Aussi, Valentin Magnan décrit plusieurs types de dégénérescence qui se manifestent par des stigmates moraux et physiques. Sur ce terrain prédisposé surviennent des accidents psychopathologiques transitoires comme les bouffées délirantes des dégénérés. La littérature naturaliste avec les romans de Zola et des Goncourt, la criminologie avec Lombroso reprennent cette idée d'un atavisme et des stigmates de la dégénérescence.
Par ailleurs, des anomalies héréditaires, congénitales ou acquises précocement, peuvent entraîner un déséquilibre constitutionnel des fonctions psychiques. Ainsi, Ernest Dupré décrit des constitutions proches des tempéraments hippocratiques. La théorie de la dégénérescence introduit la notion d'évolution diachronique, plus avancée que la simple localisation cérébrale des fonctions, mais en même temps l'idée d'une hérédité inéluctable.


L'influence de la psychopathologie

Théodule Ribot a créé une école de psychopathologie non strictement médicale, parallèle à la tradition psychiatrique.
Jusqu'à la fin de la Seconde Guerre mondiale, avant l'individualisation des études de psychologie, la psychopathologie fut enseignée à la faculté des lettres comme une discipline philosophique. Aussi, Georges Dumas et Alfred Binet à la Sorbonne, Pierre Janet au Collège de France ont influencé la neuropsychiatrie par leur approche de la maladie mentale. Leur approche était plus synthétique qu'analytique, rationaliste et souvent expérimentale. En outre, elle a longtemps été critique à l'égard des thèses psychanalytiques.
En Allemagne, Ernst Kretschmer tente d'établir des corrélations entre des types psychologiques et des caractéristiques organiques constitutionnelles. À la différence des tentatives antérieures, la typologie de Kretschmer ne part pas d'idées préconçues mais s'appuie sur l'étude clinique d'une population de malades dont les caractéristiques psychologiques et corporelles sont soigneusement répertoriées. Aussi, les facteurs humoraux jouent un rôle important. On ne recherche pas de localisations cérébrales. On doit également à Kretschmer l'idée des degrés intermédiaires entre le normal et le pathologique. Ainsi, avant la schizophrénie, il existe un type schizothyme puis un type schizoïde. En outre, Kretschmer fait appel à des méthodes de statistique et de psychologie expérimentale, comme la tachistoscopie.


Les précurseurs du DSM

Pour Emil Kraepelin, le psychiatre doit savoir reconnaître les signes objectifs utiles au pronostic des maladies mentales. Il reste descriptif et ne se fonde pas sur une théorie comme celle de la dégénérescence. Ses conceptions ont pu ainsi être reprises par le DSM (le manuel diagnostique et statistique des troubles mentaux).
Kurt Schneider a également influencé le DSM, notamment le DSM III par sa différenciation entre symptômes de premier et de deuxième rang. Seuls les symptômes de premier rang sont essentiels au diagnostic de schizophrénie. Le patient peut ainsi présenter un type particulier d'hallucinations auditives, proches de l'automatisme mental. Il se pense dépossédé de ses propres pensées et sent qu'on lui impose des pensées étrangères comme dans le syndrome d'influence de l'école française. Même si Schneider reconnaît l'origine organique des maladies mentales, il fonde sa classification sur la description de la symptomatologie.


La psychopharmacologie

Willy Mayer-Gross a introduit la psychopharmacologie expérimentale dans un milieu psychiatrique anglais dominé par l'organicisme de Henry Maudsley. En France, Jean Delay et Pierre Deniker restent les initiateurs de la psychopharmacologie. Celle-ci modifie les comportements en agissant sur le système nerveux central. Aussi, les progrès dans cette discipline ont conduit au développement actuel des neurosciences.


La psychiatrie biologique

Aujourd'hui, si certains auteurs, comme Nancy Andreasen aux États-Unis, défendent encore les hypothèses neuroanatomiques, en particulier pour la schizophrénie, à partir des résultats de l'imagerie cérébrale, la psychiatrie s'est éloignée de la neurologie. En effet, l'intérêt s'est déplacé sur l'étude de la transmission neuronale et des récepteurs à un niveau fondamental, au-delà même des modèles de comportement animal nécessaires à l'étude des psychotropes.
Aussi la neurobiologie risque de perdre le contact avec la réalité de la maladie mentale. C'est pourquoi nombre de psychiatres sont tentés par un retour à la clinique tout en respectant les règles de rigueur méthodologique dont les neurosciences ont montré la nécessité.

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