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Deux séances de médiumnité chez Mme Bisson - Partie 2

Annales des sciences psychiques

En 1914, par Boirac E.

Voici comment étaient placés les assistants: Mme Bisson faisait face au médium, dont les genoux touchaient presque les siens; sur la même ligne, j'étais assis à gauche de Mme Bisson et M. CI. à droite; derrière nous se tenaient, tantôt debout, tantôt assis, le Dr Bourbon et les jeunes Internes des hôpitaux; derrière-eux, M. de Fontenay à proximité des appareils de photographie braqués sur le cabinet.

La première partie de la séance, la partie d'attente, fut très longue. Elle dura certainement plus d'une heure, et je me disais, à part moi, que, sans doute, il ne se produirait rien et que je m'en irais sans avoir rien vu. Il ne faudrait pas croire, d'ailleurs, que nous soyons restés silencieux pendant tout ce temps-là. On causait très librement, on échangeait ses impressions, on interrogeait le médium, on l'encourageait, etc., mais, je le répète, sans jamais perdre de vue ses deux mains. A mesure que la séance se prolongeait, le médium paraissait s'énerver de plus en plus; il déclarait sentir l'approche des phénomènes, demandant si on ne voyait rien, entrouvrant lui-même les rideaux comme impatient de nous montrer enfin quelque chose. Mme Bisson l'exhortait à la patience, lui disant que la matérialisation, une fois bien formée, ne craignait pas la lumière, mais que, jusque là, pour lui permettre de se former, il fallait que le corps du médium restât dans l'ombre. Cependant l'agitation du médium grandissait; ses soupirs, ses gémissements, ses halètements changeaient de caractère; on aurait cru assister à une sorte d'accouchement. Enfin un premier phénomène apparut: ce fut d'abord, entre les lèvres du médium, comme un prolongement de la langue, un cylindre charnu, une sorte de doigt rétractile, qui disparut pendant que les rideaux s'entrouvraient plus largement, puis reparut, et sembla tomber hors de la bouche entre les genoux du médium recouverts par le sarrau; mais tout ce que ma main trouva sur la place, ce fut une humidité pareille à celle que laisse après elle une large goutte de pluie, suffisante pour mouiller mon doigt, et inodore. Comme si les phénomènes étaient maintenant déclenchés, de nouvelles manifestations survinrent coup sur coup: ce fut d'abord un rabat de substance grisâtre, plus long que large, couvrant le menton, le cou et la poitrine du médium; puis ce fut une sorte de mouchoir ou de foulard de la même substance étendu sur l'épaule gauche du médium, couvrant la partie gauche de la poitrine et paraissant relié à la bouche du médium. Cette substance avait un aspect plissé qui rappelait jusqu'à un certain point la texture du péritoine ou de l'épiploon. Mme Bisson darda sur elle la lumière d'une lampe électrique de poche afin de permettre de la mieux voir; mais, en général, ses apparitions et ses disparitions m'ont semblé également brusques. M. CI. fut invité par Mme Bisson à étendre la main pour toucher la substance, mais, soit qu'il eût fait un geste trop brusque, soit pour toute autre raison, la substance se résorba en quelque sorte instantanément et M. CI. eut l'impression d'un simple contact avec une étoffe, vraisemblablement l'étoffe du sarrau.

En raison de l'heure tardive et de la fatigue du médium, en ne crut pas utile de prolonger la séance. Le médium, non réveillé, fut de nouveau contrôlé, ainsi que le cabinet, de la même façon qu'au début, et rien de nouveau ne fut constaté, sinon que le sarrau était humide et comme mouillé dans la partie qui avait été en contact avec la substance, surtout à l'épaule. On se sépara en se donnant rendez-vous pour le surlendemain.

Je m'étendrai moins longuement sur la seconde séance à laquelle assistèrent les mêmes personnes, sauf M. de Fontenay, et dans laquelle le contrôle se fit exactement, comme dans la première. Je dois cependant noter que, presque aussitôt après que le médium fut endormi, je m'assis en face de lui à la place de Mme Bisson et y restai jusqu'à la fin. Les phénomènes se firent attendre peut-être encore plus longtemps et ils différèrent de ceux que nous avions précédemment observés par deux circonstances principales.

I. — La substance revêtit cette fois la forme d'un amas de cordons, plus ou moins analogue à un lacis de veines ou d'artères de coloration grisâtre, auquel était suspendu, un doigt d'un blanc nacré. Elle paraissait sortir de la bouche du médium et se placer, soit en avant de sa poitrine, soit sur son épaule droite.

II. — On put l'observer plus aisément et plus longuement, grâce à la lumière intense projetée sur elle par la lampe de poche électrique de Mme Bisson. De plus, elle put être touchée, sinon maniée, par la plupart des assistants, M. CI, un des internes et moi-même. Les deux premiers la tinrent entre leurs mains; le second même, si je ne me trompe, palpa le doigt mystérieux et eut l'impression d'un objet solide; en ce qui me concerne, ayant eu ma main gauche prise par la main droite du médium, celui-ci la porta à sa bouche, et le doigt avec le lacis qui l'entourait fut promené sur la face dorsale de ma main où j'éprouvai une impression de froid et d'humidité.

Tels sont les faits dont j'ai été témoin. Je n'en tire pour le moment aucune conclusion. Je me borne à raconter ce que j'ai vu. Je laisse à de plus habiles que moi le soin de proposer des explications.


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