La définition de Sociale


La psychologie sociale

La psychologie sociale désigne la science des liens entre, d'une part, les organisations individuelles des comportements, sentiments, cognitions et perceptions, et d'autre part, leurs multiples régulations sociales.
La psychologie sociale se différencie aussi bien de la psychologie qui étudierait exclusivement les organisations individuelles, que de la sociologie qui privilégie l'étude des rapports entre individus et groupes pour autant qu'ils s'insèrent dans des dynamiques caractéristiques d'une société. Le but de la psychologie sociale est précisément d'expliquer comment les systèmes d'organisation individuelle s'intègrent dans un ensemble social et, réciproquement, comment un ensemble social structure et oriente les organisations individuelles.


Les thèmes organisateurs de la psychologie sociale

En psychologie sociale, de multiples recherches publiées chaque année sont apparemment sans beaucoup de liens entre elles. Elles ne sont pas intégrées dans des systèmes conceptuels généraux. Toutefois, des tentatives d'intégration existent, notamment lors de la restitution des résultats de recherche dans des manuels. Ainsi, Willem Doise, Jean-Claude Deschamps et Gabriel Mugny regroupent les recherches en deux grands ensembles:

  • Un ensemble portant sur des dynamiques collectives, c'est-à-dire sur des processus de différenciation entre des groupes sociaux et d'intégration dans ces groupes. Il s'agit manifestement d'une bipolarité, certains auteurs s'intéressant davantage à des dynamiques divergentes en utilisant les notions de catégorisation, de déviance, d'effets minoritaires. D'autres auteurs cherchent davantage à analyser des effets d'intégration comme la normalisation, la polarisation ou l'identité sociale. Cependant, ces dynamiques apparemment opposées de différenciation et d'intégration peuvent être considérées comme complémentaires. Ainsi, pour rendre compte de l'intégration dans un groupe, la différenciation par rapport à d'autres groupes est étudiée, et vice versa.

  • Un ensemble portant sur l'analyse du comportement social des individus, en termes d'interdépendance, à l'aide de concepts comme la comparaison sociale, la réactance, l'effet modèle, ou en termes d'autonomie en faisant appel à des processus de développement, d'internalité, d'équilibre cognitif. Ces processus de fonctionnement interdépendant ou autonome doivent également être considérés comme complémentaires. L'étude de l'individu autonome nécessite l'étude de son interdépendance et vice versa. Une telle conception est aujourd'hui fréquente dans les études sur le développement social et cognitif où l'individu est considéré comme équipé de schèmes, de répertoires comportementaux qui lui permettent de participer à des interactions sociales. Ces interactions produisent des capacités de coordinations nouvelles qui permettent à l'individu de s'engager dans des nouvelles interactions. Bien entendu, une telle conception de développement en spirale ascendante ne rend pas compte d'autres aspects de la réalité qui peuvent aussi consister en des régressions et des blocages de développement. Mais l'important est de considérer qu'autonomie et interdépendance sont des notions complémentaires, trop souvent étudiées d'une manière isolée.

Les quatre niveaux d'analyse

Une autre manière d'organiser les explications en psychologie sociale est de les classer selon qu'elles relèvent d'une explication de nature préférentiellement psychologique ou sociologique. Une classification en quatre types semble suffire pour rendre compte des principes explicatifs actuellement utilisés par les psychologues sociaux:

  • Un niveau d'explication se focalisant sur l'étude des processus intra-individuels: les modèles utilisés portent sur la manière dont les individus organisent leurs expériences de l'environnement. Si les études de l'intelligence recourent traditionnellement à des modèles se situant à ce niveau, le courant de la psychologie sociale cognitive a étendu l'application de telles analyses individuelles dans de multiples domaines, comme dans celui des études de l'attribution d'intentionnalité, de l'asymétrie entre la perception d'homogénéité dans des groupes d'appartenance et de non-appartenance.

  • Un niveau d'explication décrivant des processus interindividuels et situationnels: les individus y sont souvent considérés comme interchangeables et ce sont leurs systèmes d'interaction qui fournissent les principes explicatifs typiques de ce niveau. Par exemple, les opérations cognitives y sont étudiées pour autant qu'elles sont générées par des coordinations interindividuelles, les phénomènes d'influence sociale comme résultant d'une recherche d'un optimum de concessions entre individus et les effets intergroupes comme correspondant à une facilitation des interactions entre personnes partageant le même sort.

  • Un niveau tenant compte des différences de positions que différents acteurs sociaux occupent dans le tissu des relations sociales caractéristiques d'une société: ainsi, pour ce qui est de l'étude de l'influence sociale ou des relations intergroupes, on analyse les rapports de statut majoritaire ou minoritaire, de pouvoir ou de marginalité entre source et cible d'influence ou entre groupes en interaction.

  • Un niveau faisant appel à des systèmes de croyances, de représentations, d'évaluations et de normes sociales: ce sont les productions culturelles et idéologiques caractéristiques d'une société ou de certains groupes particuliers qui non seulement donnent une signification aux comportements des individus, mais encore créent ou entretiennent des différenciations sociales au nom de principes généraux. Par exemple, des études sur les relations intergroupes analysent l'intervention de hiérarchies complexes et de valeurs complémentaires permettant à différents groupes de se construire une identité positive. Il ne semble pas possible d'étudier des processus intra-individuels, interindividuels ou positionnels sans faire intervenir des analyses portant sur des croyances générales et des hiérarchies de valeurs.

Cette distinction de quatre niveaux d'analyse ne sert pas seulement des buts classificatoires, elle doit surtout servir à un travail d'articulation d'analyses. L'articulation entre modèles de niveaux différents reste souvent implicite dans une démarche qui fait abstraction de facteurs hétérogènes afin d'étudier des processus spécifiques en gardant les autres variables constantes, voire en les contrôlant par les lois du hasard. Cependant, les analyses faisant intervenir plusieurs niveaux théoriques sont plus complètes. Elles incitent à mieux décrire un processus conceptualisé à l'un des quatre niveaux, tout en précisant davantage les conditions de son actualisation relevant d'autres niveaux d'analyse.
Un exemple peut éclairer cette conception de l'articulation entre niveaux d'analyse. Le modèle explicatif de la dissonance cognitive relève typiquement du premier niveau d'analyse, car la réduction des contradictions entre cognitions incompatibles est étudiée principalement comme un processus d'organisation de l'expérience individuelle. Cependant, la nécessité de maintenir son image de soi par rapport à autrui ou le respect de spécificités liées à des appartenances catégorielles influent sur le fonctionnement de ce processus et invitent à faire appel à des analyses du niveau interindividuel et positionnel. De même, des articulations avec le niveau idéologique sont proposées par les auteurs qui étudient les processus de réduction de la dissonance comme constitutifs de fonctionnements idéologiques ou par d'autres auteurs qui considèrent la réduction de la dissonance comme un produit d'une idéologie véhiculant l'image d'un individu autonome et cohérent.
L'individuel et le social semblent souvent constituer, dans les explications de psychologie sociale, mais aussi en sociologie, deux pôles opposés, valorisés différemment et dotés d'une force inégale selon les contextes historiques et sociaux. Il s'agit sans doute d'une opposition qui, tout en étant scientifique, est aussi idéologique. Nos sociétés ont, d'une part, besoin de propager la conception d'un individu autonome, maître de ses actes, capable de s'engager dans des contrats de toute sorte. D'autre part, rien n'est plus évident que l'existence d'entités collectives comme les nations, les cultures, les organisations, les familles, qui sont délimitées par autant de frontières destinées à faire respecter des distances et à sauvegarder des intérêts variés. Dépasser de telles oppositions est précisément le but du travail d'explication en psychologie sociale, en montrant comment une explication exhaustive à un niveau doit nécessairement faire intervenir des explications se situant à un autre niveau.


La méthodologie de la psychologie sociale

Il s'agit de l'étude des procédures de la recherche empirique. Partant d'une réflexion épistémologique, la méthodologie débouche sur une comparaison entre les propriétés de différentes approches qui, telles l'observation, l'enquête et l'expérimentation, se situent sur un continuum défini par des probabilités différentes de confusion des sources de variation, et par des procédures d'y remédier différentes.
Située à la confluence du psychologique et du social, comprenant de multiples domaines d'investigation et de champs d'intervention, la psychologie sociale fait appel à une grande variété de méthodologies. Celles-ci principalement l'analyse de données secondaires, l'observation, l'entretien, l'enquête et l'expérimentation s'accordent dans leur but ultime qui est de mettre en évidence et d'assurer la validité de relations entre des variables. Toutes les approches méthodologiques permettent d'effectuer des comparaisons interprétables entre individus ou groupes d'individus, en écartant les hypothèses alternatives qui, lorsqu'elles sont plausibles, rendent ces comparaisons ambiguës et fallacieuses.


Le continuum méthodologique

Les méthodes diffèrent entre elles, d'une part, quant aux dispositifs mis en place pour décrire les relations entre les variables, et d'autre part, quant aux manières qu'elles préconisent pour en assurer la validité interne et la possibilité de généraliser à d'autres populations et à d'autres contextes sociaux.
Il convient d'abord de souligner une distinction entre les rôles indépendant et dépendant qu'assument les variables en jeu dans une investigation. Les premières variables sont celles dont on examine les effets, les secondes ce par quoi on mesure les effets. Or les variables ne sont pas intrinsèquement dépendantes ou indépendantes: ce rôle leur est conféré par un modèle théorique. Par exemple, on peut poser que la consommation de films qui contiennent des scènes violentes (variable indépendante) engendre des comportements agressifs. Mais un autre modèle peut poser que les modalités de socialisation de l'individu sont responsables de son intérêt pour ces mêmes programmes (variable dépendante). Les variables indépendantes peuvent ensuite être utilement subdivisées, soit en variables étiquettes, comme le sexe, l'âge, l'appartenance religieuse, qui sont constatées ou invoquées, soit en variables provoquées ou manipulées, qui portent surtout sur des caractéristiques des situations dans lesquelles sont placés les individus. Ainsi, on peut étudier les effets de l'anxiété sur les performances individuelles à une tâche en observant les comportements d'individus anxieux (par exemple, des personnes qui se rongent les ongles). On les comparera aux comportements d'un groupe composé d'individus qui ne se rongent pas les ongles. Mais on peut également convoquer des individus en laboratoire, et les répartir en deux groupes (conditions expérimentales). Un groupe seulement sera soumis à des instructions provoquant de l'anxiété, et les performances des membres des deux groupes seront comparées.
Ces distinctions entre différents rôles et natures des variables permettent de décrire les principaux traits des approches méthodologiques. Ce qui sépare les approches expérimentales et les approches d'observation est leur inégale exposition au risque de confusion des variables indépendantes. Deux variables sont dites confondues lorsque les modalités de l'une sont associées de manière systématique aux modalités de l'autre. Cette confusion est souvent partielle (par exemple, entre l'âge et l'état civil, dans la mesure où les individus les plus âgés ont davantage de chance d'être mariés), mais elle peut dans certains cas avoisiner le chevauchement des deux variables (comme entre l'âge et la parenté fils, père, grand-père, etc...). Lorsque le degré de confusion entre les variables dépasse un seuil critique, il s'avère difficile, voire impossible, de distinguer les effets imputables à chacune des variables sur la variable dépendante d'intérêt. Bien qu'elles puissent être fort distinctes (comme l'âge et l'état civil), les variables confondues impliquent alors des informations trop similaires eu égard à cette variable dépendante.
La confusion des sources de variation est le principal écueil que doit surmonter la recherche empirique pour produire des résultats ayant une validité suffisante. Chaque approche sur le continuum méthodologique met en oeuvre des stratégies spécifiques pour contourner la menace de confusion, et pour la résoudre une fois qu'elle a été établie.


Le pôle de l'observation

Lors d'analyses de données secondaires, d'observations de comportements, etc..., le chercheur doit se limiter à inventorier, à délimiter et enfin à observer des caractéristiques associées aux unités d'observation. Il porte un regard sur cette réalité sans y intervenir de manière substantielle. La confusion des sources de variation surgit infailliblement parmi l'ensemble des indicateurs sélectionnés. Par exemple, étant donné le grand nombre de facteurs qui interagissent avec l'état anxieux des individus (situation professionnelle, affective, conditions de logement, etc...), le chercheur qui repère des individus anxieux sera inévitablement confronté à une multitude de facteurs potentiellement responsables de cet état ou associés avec cet état. Pour cette raison, le constat de différences entre deux groupes d'individus ou deux situations aura de fortes chances d'être tout aussi bien imputable à d'autres différences entre ces groupes ou situations que celles qui intéressent le chercheur.
Le langage causal est par conséquent difficilement justifié dans ce contexte, et il convient de s'en tenir à la formulation de concomitances, de covariations ou de corrélations entre les variables indépendantes et dépendantes, qui assument des rôles symétriques. Par exemple, il peut s'avérer que, au sein des travailleurs d'une entreprise, l'aptitude à commander soit plus prononcée chez les hommes que chez les femmes. La covariation entre le sexe des travailleurs et cette aptitude est incontestable. Toutefois, il faut s'abstenir d'inférer un lien de causalité entre ces variables. Imaginons que dans l'entreprise les cadres soient majoritairement de sexe masculin et les employés de sexe féminin. Il est vraisemblable que la fonction de cadre conduise les individus à développer de meilleures capacités à commander. La confusion entre le sexe et le statut des travailleurs dans l'entreprise donne à voir une relation significative entre la première variable et la variable dépendante. Mais c'est donc le statut dans l'entreprise, et non le sexe, qui est le facteur responsable des différences observées en matière d'aptitude à commander.
Cet exemple suggère que les approches d'observation sont très exigeantes en ceci qu'elles doivent être soigneusement programmées.
Etant donné que le chercheur ne peut pas contrôler la répartition des unités d'observation dans les groupes, il doit, d'une part, inclure dans ses observations une foule de variables qui sont potentiellement confondues entre elles, et d'autre part, effectuer les observations dans le plus grand nombre de contextes possible, avec l'espoir de constater la persistance de la relation prédite dans tous les contextes. Cette démarche consiste à rendre hétérogènes les conditions ou situations dans lesquelles on observe une relation entre variables indépendante et dépendante. Aussi, afin d'assurer la validité de la relation observée, l'auteur étend sa période d'observation dans le temps.
Mais le repérage des causes est toujours incertain, car, comme l'affirme Benjamin Matalon, « la plupart des controverses relatives à une expérience portent non pas sur le résultat précis, qu'on ne met généralement pas en doute, mais sur l'interprétation qu'on en donne ; et les critiques font beaucoup d'efforts pour montrer qu'une autre variable, mal contrôlée, peut expliquer les résultats en question ». Dans le champ de l'observation, il est courant que le chercheur ne s'aperçoive des confusions entre les variables observées qu'au terme de l'intervention. Il procédera alors à une élaboration des relations entre les variables.


Le pôle de l'expérimentation

En psychologie sociale, des plans d'observation sont souvent conçus et mis en œuvre en tant qu'étapes préalables à une démarche expérimentale. Cette dernière donne plus aisément accès à une approche causale des relations entre les variables. La confusion des sources de variation menace dans une moindre mesure le pôle de l'expérimentation, car le chercheur dispose d'une technique puissante pour y faire face. Il exerce notamment un contrôle élevé sur la distribution des unités d'observation (généralement des individus) dans les diverses modalités de la variable indépendante, à savoir dans le groupe expérimental (les participants qui reçoivent le traitement) et dans le groupe contrôle (ceux qui ne reçoivent pas le traitement).
Ce contrôle s'exerce à travers la hasardisation (ou randomisation, ou répartition au hasard) des individus dans ces groupes. Les différences individuelles se retrouvent alors distribuées de manière homogène dans les deux groupes, et sont sans association systématique avec la variable de traitement expérimental. Les différences observées entre les deux groupes pourront donc être imputées à ce traitement. Mais bien que la hasardisation soit simple dans son principe, elle n'est pas de réalisation facile. Par exemple, pour un chercheur devant évaluer les mérites d'une technique pédagogique, il semblerait légitime d'instruire un maître qui dispensera l'enseignement dans une classe d'élèves (groupe expérimental). Il suffirait alors de comparer les progrès effectués par les élèves dans la nouvelle classe et dans une classe traditionnelle. Mais le principal problème avec cette procédure consiste dans la confusion entre la pédagogie et l'enseignant. Même en veillant à ne pas confier la tâche de la nouvelle pédagogie à un enseignant d'un autre sexe ou d'âge sensiblement différent, les deux maîtres diffèrent entre eux non seulement en tant qu'ils appliquent des techniques pédagogiques distinctes, mais également par rapport à de multiples autres caractéristiques qui, bien que ne concernant pas les buts de l'étude, sont potentiellement en rapport avec les progrès accomplis par les élèves (par exemple, l'autorité des maîtres envers les élèves, la clarté avec laquelle ils transmettent les connaissances, leur propre opinion concernant la technique pédagogique adoptée, etc...). Les progrès accomplis par les élèves doivent pouvoir être imputés avec suffisamment de certitude aux pédagogies en tant que telles.
Les solutions à ce type de problème sont toujours multiples, mais elles ne sont pas nécessairement équivalentes. On peut d'abord imaginer que chacun des deux maîtres exerce les deux pédagogies auprès des mêmes élèves, durant des périodes d'égale durée. Le risque serait toutefois que la seconde pédagogie exercée bénéficie d'un accroissement de la motivation ou de l'expérience du maître ainsi que de celles des élèves. Bien meilleure est la solution qui consiste à recruter d'autres maîtres, faisant en sorte que chaque pédagogie, nouvelle et traditionnelle, soit utilisée par plusieurs maîtres dans des classes distinctes mais composées d'élèves aux niveaux de connaissances préalables similaires. Il faudra veiller à répartir les différences entre les maîtres (sexe, âge, caractéristiques de personnalité, etc...) dans les deux groupes. Les groupes expérimental et de contrôle devront différer entre eux sur un seul aspect, à savoir la technique pédagogique utilisée par les maîtres.
Dans ce contexte, les différences entre les progrès accomplis par les élèves à l'intérieur de chacun des groupes expérimental et de contrôle définissent la variation de la véritable dépendante appelée erreur expérimentale. Cependant, ce terme ne signale aucune faute ou inhabileté du chercheur.
Ainsi, on conçoit que les dispositifs expérimentaux, de par leur habileté à contourner la confusion des sources de variation et donc à prétendre à la validité interne de l'investigation, permettent le plus souvent la tenue d'un langage causal. Les variables indépendantes et dépendantes assument des rôles asymétriques. Dans la mesure où la hasardisation des unités d'observation dans les conditions expérimentales a été effectuée avec succès, le chercheur acquiert une certaine confiance dans l'attribution causale des effets observés aux variables indépendantes manipulées. En revanche, une hasardisation mal conduite aboutit presque inéluctablement à l'abandon de l'expérience.
Le problème inclut nécessairement une forme différente dans le contexte de l'observation. Ici, le chercheur doit planifier attentivement la récolte des observations, tout en devant agir sur le plan de l'analyse de ses données afin de démêler les confusions observées. Mais, quel que soit le type de méthodologie employée par le psychologue social, sa finalité consiste dans la délimitation puis la confirmation de processus qui sont à l'oeuvre chez un individu considéré dans les contextes sociaux dans lesquels il évolue.


La psychologie sociale appliquée

Il s'agit d'une discipline dont l'objectif est de comprendre et de prédire des comportements sociaux dans leur contexte, et dont la vocation est de favoriser le changement social.
Dès la naissance de la psychologie sociale comme discipline scientifique, les chercheurs ont orienté leur démarche d'investigation vers des questions qui concernaient directement les comportements de l'individu dans les situations sociales quotidiennes, notamment ses comportements au sein des organisations. Les travaux des psychologues sociaux effectués, pour la plupart, sous l'impulsion des autorités civiles et militaires nord-américaines au cours de la Seconde Guerre mondiale étaient clairement appliqués au sens où il était demandé à ces chercheurs de trouver des solutions concrètes à des problèmes posés par la situation.
Ainsi, la recherche de Carl Hovland, Arthur Lumsdaine et Fred Sheffield (1949), réalisée en plein conflit américano-japonais, et destinée à mettre en évidence la stratégie de persuasion la plus efficace pour amener les soldats américains à accepter l'idée que la guerre serait plus longue qu'ils ne l'envisageaient, représente un bel exemple d'un mode d'investigation en psychologie sociale. Celle-ci allait bientôt porter une étiquette significative: la recherche-action. Dans cette recherche, les auteurs avaient pu mettre en évidence l'intérêt d'adapter la forme d'un message persuasif au niveau d'instruction du public visé. Ainsi, pour un public peu instruit, il s'avérait plus efficace de fournir une argumentation simple (développant uniquement des arguments en faveur d'une guerre longue), alors qu'un public instruit apparaissait plus sensible à une argumentation multiple plus accessible par les soldats, parce que correspondant à leur conviction initiale.
De même, les recherches de Gordon Allport et Leo Postman (1945) sur la rumeur, et plus précisément sur le manque d'efficacité des démentis officiels, puis de Leon Festinger, Stanley Schachter et Kurt Back (1950) sur les mécanismes de diffusion d'une rumeur dans une population de vétérans constituent, elles aussi, parmi les recherches marquantes produites par les psychologues sociaux au cours des années 1940, des exemples d'une démarche d'investigation directement orientée vers les problèmes sociaux ancrés dans le temps et dans l'espace.
C'est certainement avec Kurt Lewin que cette démarche a pu être systématisée, donnant ainsi une consistance particulière à la notion de recherche-action. Si Lewin cherchait bien à répondre à une question concrète posée par les services officiels (gérer la pénurie alimentaire par une modification des comportements des ménagères), c'est à partir d'une authentique théorie, la théorie du champ, qu'il a conçu les recherches-actions qui allaient permettre de mettre en évidence les implications de l'équilibre quasi stationnaire qui maintient les normes sociales affectant le fonctionnement d'un petit groupe. Ces implications sont formulées notamment en termes de résistance au changement et de dynamique des groupes. C'est ainsi que Lewin a pu dégager des stratégies originales et efficaces destinées à modifier les habitudes des ménagères américaines de l'époque concernant certains produits alimentaires, en produisant dans un groupe une décristallisation, suivie d'un déplacement (provocation d'un changement au moyen d'une prise de décision collective), puis d'une phase de cristallisation (destinée à renforcer le nouvel état d'équilibre).


La rupture entre la recherche fondamentale et la recherche appliquée

L'ancrage de la recherche en psychologie sociale dans le champ social, très net jusqu'à la fin des années 1940, s'est peu à peu relâché au cours des trois décennies suivantes, amenant la psychologie sociale académique à privilégier des recherches dites de laboratoire dont la finalité pouvait être très éloignée de l'environnement social, au détriment de recherches axées plus directement sur les problèmes sociaux.
Ce constat a amené certains auteurs à considérer qu'il existe une fracture entre les psychologues orientés vers la science et les psychologues orientés vers l'action. Cette fracture repose sur des conflits méthodologiques, politiques et sociaux. Cependant, certains facteurs peuvent être évoqués pour rendre compte de cette évolution historique:

  • Le contexte social et la demande provenant de l'environnement: ils représentent des facteurs explicatifs du désintérêt des chercheurs pour l'application. Les autorités civiles et militaires, mais aussi le monde industriel, ont commandité, au cours des années 1930 et 1940, des recherches de psychologie sociale en raison des problèmes soulevés par les grandes crises. Cette manne pour les chercheurs semble s'être fermée à cette date.

  • Les bouleversements idéologiques de la fin des années 1960: ils ont été à l'origine d'une désillusion de la part des psychologues sociaux impliqués dans l'étude du changement social. L'idéal démocratique et de cogestion que prônaient les psychosociologues s'est trouvé bousculé par une mise en cause de leur participation à un système de reproduction sociale.

  • La prédominance d'un nouveau paradigme en psychologie, le cognitivisme: il s'agissait d'abord d'en montrer la pertinence au regard des modèles théoriques existants avant de chercher à l'appliquer. Les relations entre le chercheur et l'environnement s'en sont également trouvées modifiées. L'individu étudié par les théoriciens des relations humaines était inséré dans les organisations. En revanche, l'individu étudié par les tenants du paradigme du traitement de l'information semble plus contemplatif, davantage désireux de comprendre et d'expliquer le monde qui l'entoure que de se comporter.

  • Les théories des années 1960 et 1970: elles ont souvent véhiculé des hypothèses contre-intuitives, creusant un fossé entre le chercheur et les commanditaires qui n'ont plus trouvé dans le psychologue cet interlocuteur de bon sens, capable de formaliser en termes scientifiques des intuitions qu'ils possédaient déjà.

  • L'augmentation progressive des standards scientifiques: elle a également contribué à éloigner des chercheurs des champs d'application, car nul doute qu'il s'avère souvent malaisé de construire une expérimentation digne de faire l'objet d'une publication dans les meilleures revues lorsqu'on est confronté aux contraintes du terrain. L'évolution de la discipline vers les sciences de la vie plutôt que vers les sciences sociales s'est probablement accompagnée d'une propension à privilégier des mesures toujours plus fines, ce qui a entraîné une certaine confusion conceptuelle entre précision de la mesure et rigueur de la démarche d'investigation.

  • La tendance accrue à la spécialisation des chercheurs: elle a certainement produit quelques cloisonnements entre la recherche fondamentale et la recherche appliquée.

Le renouveau de la psychologie sociale appliquée

Depuis les années 1970, on peut constater un regain d'intérêt pour la psychologie sociale appliquée. Aussi, les travaux réalisés peuvent être classés en fonction de leur démarche: démarche d'évaluation (de programmes de formation, de politique organisationnelle, etc...), démarche de compréhension de phénomènes sociaux (agression et violence, conflits intergroupes, minorités actives), etc...
Enfin, on peut relever une démarche récente de constitution de disciplines axées sur un objet précis. Il s'agit, notamment, des psychologies de l'environnement, de l'éducation et de la formation, du travail et des organisations, de la communication, etc..., mais aussi de la psychologie du témoignage oculaire.

Autres termes psychologiques :

Interdépendance sociale
Centre d'hébergement et de réinsertion sociale
Désirabilité sociale
Covariance
Interaction

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